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L’HISTOIRE DE L’ARTHROPLASTIE TOTALE DE HANCHE EN FRANCE

L’histoire de l’arthroplastie totale de hanche en France est marquée par deux traits dominants.

Une imagination extrêmement fertile des chirurgiens orthopédiques et souvent une compréhension plutôt pauvre des problèmes mécaniques de l’articulation de la hanche.

1965 – 1972

Débuts de l’arthroplastie totale de hanche

Succès – Problèmes – Limites

 

Mc KEE – WATSON FARRAR

Introduite en France en 1965 par Teinturier et Merle d’Aubigné
Deux pièces en Co Cr fixées par du ciment acrylique
Prothèse fémorale de Thompson à tête de 41. Cotyle hérissé de picots
Prothèse dérivée de la Mc Kee. Prothèse de Moore à tige pleine, tête de 41 mm
Picots cotyloïdiens plus courts

1965, 1969 – Prothèse métal-métal (Mc Kee-Merle d’Aubigné)

 

A 2 ans           

10 %

De descellements cotyloïdiens

réels ou potentiels

Prothèse métal-métal

R-JUDET

Cotyle en polyéthylène rétentif, tête de 35 mm
Tige virgule

Descellements cotyloïdiens
et fémoraux fréquents

Prothèse tory-bloc
Métallose

LAGRANGE-LETOURNEL

Pièce fémorale fine à grosse tête (35 mm)

LAGRANGE-LETOURNEL

Nombreux descellements
Cotyloïdiens et fémoraux

M-E-MULLER

Tige banane à tête de 32 mm
Grande diffusion

M-E-MULLER

Nombreux déboires
Descellements cotyloïdiens, fémoraux
Fractures de tige

Prothèse low-friction

Pièce fémorale en acier inoxydable

avec une tête de 22 mm

Cotyle en polyéthylène de haute densité,

épais

Utilisation à partir de 1969

PROTHESE TOTALE DE J. CHARNLEY (1969-72)

A deux ans :
DESCELLEMENTS FEMORAUX POTENTIELS
24 %
Liseré clair au dos de la prothèse fémorale
Fracture distale du ciment
Enfoncement de la prothèse dans le ciment

1972-1986

. Fin temporaire des prothèses métal-métal

. Début de la fixation sans ciment

. Amélioration de la forme des prothèses cimentées

. Multiplication des modèles

1972 R. JUDET – Prothèse sans ciment

Prothèse à surface irrégulière dite porometal, tête amovible fixée au col par un cône morse
Cupule en polyéthylène enchâssée dans un cylindre en stellite, rétentive de la tête fémorale

R. JUDET -Prothèse sans ciment

 

Tige cylindro conique en Co Cr revêtue de billes dite «madréporique»

Cotyle métallique de forme tronc conique

fixé au cotyle osseux par vissage

Multiplication des cotyles vissés

inspirés du cotyle de Lord

 

Prothèse alumine-alumine

Prothèse fémorale cimentée.

Cotyle à ergots pouvant être utilisé sans ciment

 

Nombreux ennuis mécaniques. Difficulté de fixation de la tête fémorale au col

Rupture du matériau due à sa fragilité

Développement des têtes fémorales en alumine

Prothèse métal-métal

Cupule à bandes de glissement

Métallose, ostéolyse péri cotyloïdienne, descellement du cotyle

Caractéristiques mécaniques
du ciment PMMA

Résistance à la pression 93 Mpa

Résistance à la flexion 64 Mpa

Résistance au cisaillement 42 Mpa

Résistance à la traction 35 Mpa

1972

M. KERBOULL

Modification de la pièce fémorale de Charnley (forme et architecture) pour décharger le ciment des contraintes nocives (traction, cisaillement, flexion) et ne le soumettre
qu’à des contraintes de pression

Redressement de l’angle cervico diaphysaire à 130°
Élargissement et épaississement de la tige dans sa portion métaphysaire

Augmentation régulière de l’angle de décroissance de la section

Adaptation de la tige prothétique aux dimensions du canal  médullaire
Nécessité d’une gamme étendue de pièces fémorales

Survie à 20 ans de la pièce fémorale : 98,4 %
traduisant l’extrême fiabilité de la fixation cimentée de cette prothèse

Ces tiges sont plus solides, mais la matité de la surface est à l’origine d’autres soucis

Au début des années 1980, il existe un contraste important entre la fiabilité de la fixation cimentée des prothèses récentes dont la technique d’implantation s’est bien améliorée et les aléas de la « fixation biologique » sans ciment.

Malgré une apparente et immédiate fixation solide, les cotyles vissés migrent fréquemment.
Les pièces fémorales :

– ou leur fixation est incertaine
– ou elle est uniquement diaphysaire

Dans les deux cas, douleurs et boiterie altèrent la qualité du résultat

Autre problème : difficulté d’extraction de la pièce fémorale lorsqu’elle est solidement fixée à l’os

Tige fémorale conique, revêtue d’oxyde d’alumine et vissée.
Absence fréquente de fixation rigide ou impossibilité d’extraction sans dégâts osseux importants

 

 

Tige fémorale conique à rainures longitudinales.

Ablation aisée de la prothèse,

mais fixation à l’os incertaine et précaire.

 

BUTEL


Tige élastique à 4 brins

Fixation à l’os précaire, mais ablation aisée

 

CIROTTEAU

Remplace la tige médullaire par une plaque vissée sur la corticale externe du fémur

Réinventant 40 ans après                         
la prothèse de P. Wiles (1938) 

GERARD

Supprime la tige fémorale, couvre la tête fémorale d’une cupule métallique articulée avec une cupule cotyloïdienne en polyéthylène enchassée dans une cupule métallique

« Double cupule »

TRENTANI, FREEMAN, WAGNER, AUBRIOT

Reprennent l’idée de Gérard, mais cimentent les deux pièces

« Double cupule cimentée »

Multiplication des prothèses
Quelques exemples de la multitude des prothèses existant à cette époque

Diminution de taille de la tête fémorale

1986 – 1997

- Amélioration de la forme et du revêtement des prothèses sans ciment

- Début de l’hydroxyapatite

- Développement de la modularité

- Usure du polyéthylène

Progrès considérables dans les prothèses sans ciment

– Utilisation de l’alliage de titane pour la tige et le cotyle.
- Forme hémisphérique du cotyle.
- Adaptation de la tige fémorale aux dimensions du canal médullaire.
- Amélioration du revêtement des pièces prothétiques.
– Limitation à sa partie métaphysaire.
– Introduction du revêtement d’hydroxyapatite.
- Augmentation de la nécessité d’un cône morse.

Développement de la modularité Avantages Inconvénients

Développement de la modularité tête col
Mais aussi insert en polyéthylène et cotyle, et même tige col.
Nombreux ennuis dus à la mobilité de l’insert en polyéthylène dans sa coquille métallique ou de la tête fémorale sur son cône morse

Usure du polyéthylène

– Débris de polyéthylène

– Granulomes*

- Ostéolyse

– Descellement du cotyle

Usure du polyéthylène

La maladie du polyéthylène

Conséquences :

- Diminution de la taille de la tête fémorale à 28 mm et 22 mm
– Initiation de nombreuses recherches et expérimentations

Polyéthylène moulé

Stérilisation
  • Rayons gamma
  • Oxyde d’éthylène
Emballage sous vide

Comparaison surface polie

Surfaces mate et rugueuse

  • Descellements radiologiques à 15 ans
  • Surfaces polies (Ra 0,04 µm)    0,6 %
  • Surfaces mates (Ra 0,9 µm)    3,3 %
  • Surfaces mates (Ra 1,7 µm)  10,3 %

Prothèses cimentées

Une prothèse en acier inoxydable parfaitement polie est plus sûre

1997 – 2008

– Retour vers des couples dur-dur

– métal-métal (CoCr CoCr)

– céramique-céramique (al-al)

– Abandon (provisoire) du Zircone en raison d’erreurs de fabrication

– Retour aux techniques de resurfaçage utilisant un couple métal métal

– Amélioration du polyéthylène par utilisation de polyéthylène hautement réticulé

– Progression importante du sans ciment

1997 – 2008

Les conséquences fâcheuses de l’ostéolyse due aux débris de polyéthylène ont entraîné un regain d’intérêt pour les couples dur-dur

– CoCr-CoCr : les progrès en métallurgie et usinage ont abouti à un meilleur couple de friction. En outre, l’amélioration de la fixation du cotyle à l’os grâce à un revêtement performant a aussi permis le développement des doubles cupules selon la technique de resurfaçage.

– Alumine-alumine : le problème de la fixation du cotyle à l’os a été résolu par l’utilisation d’une coque en titane avec un revêtement performant, avec ou sans hydroxyapatite.

En outre, les déçus du métal-métal ont adopté cette technique, ainsi d’ailleurs que ceux qui utilisaient la zircone avant qu’elle ne soit retirée du commerce.

Amélioration du polyéthylène par hyperréticulation due à une irradiation gamma ou faisceau d’électrons jusqu’à 10 méga rads associée à l’extraction des radicaux libres.

Ce polyéthylène hautement réticulé a une meilleure résistance à l’usure, mais avec un risque plus important d’ostéolyse en raison de la plus petite taille des particules d’usure.

Progression très importante des prothèses sans ciment.

Très importante réduction des prothèses monoblocs

CHIRURGIE DE REPRISE

Nécessité de réparer les dégâts osseux dus au descellement avant réimplantation d’une nouvelle prothèse cimentée.
Ceci aboutit à un large développement des allogreffes spongieuses et corticales.
- Soit sous forme de greffons morcelés impactés dans le canal médullaire, soit allogreffe fémorale massive de renforcement, ou remplacement segmentaire.
- Au niveau du cotyle, utilisation d’une armature cotyloïdienne métallique guidant et renforçant la reconstruction osseuse du cotyle.
Le risque de transmission par l’allogreffe d’une maladie infectieuse, a considérablement durci la législation sur les banques d’os, a poussé à l’utilisation de substituts osseux et incité à se passer de greffe.     
 
Grâce à des pièces prothétiques volumineuses, non cimentées, verrouillées à leur extrémité distale, utilisées par voie trans-fémorale. Cette technique a permis dans de nombreux cas la restauration osseuse progressive d’un fût fémoral très détérioré.       

Au niveau du cotyle, des pièces de grande taille, parfois haut situées pour obtenir un contact avec l’os vivant, ne sont pas toujours sans conséquence fâcheuse sur la fonction de la hanche.

État actuel de l’arthroplastie totale de hanche en France

Étude de l’Institut Avicenne Développement 2008
En 2007, sur 790 000 prothèses de hanche implantées en Europe, 142 000 l’ont été en France :
       35 % dans les hôpitaux publics
       65 % en cliniques privées
18 % (22 560) sont des prothèses fémorales simples
82 % (116 440) des prothèses totales
dont 22 720 de révision
5 % sont monoblocs
95 % modulaires

Sur 90 000 prothèses modulaires :

50 %, soit 45 000 sont sans ciment
35 %, soit 31 500 sont cimentées
15 %, soit 13 500 hybrides
Prothèses cimentées ont un couple
– métal-polyéthylène dans   70 %
– céramique-polyéthylène dans   30 %
Prothèses non cimentées ou  hybrides
ont un couple
– métal-polyéthylène dans   25 %
– céramique-polyéthylène dans   31 %
– céramique-céramique dans   36 %
– métal-métal dans        8 %

Volume et valeur

Pic en 2004
Depuis cette date, diminution en volume et en valeur pour revenir au chiffre de 2001 pour le volume et à celui de 1999 pour la valeur.
L’érosion en valeur devrait se poursuivre. Les prévisions pour 2010 envisagent une réduction de 6 % à 11,4 %, ce dernier chiffre pour la France.
Cette réduction des coûts est due à la régulation des remboursements et à la concurrence.
L’augmentation des coûts est due à la mise sur le marché de nouvelles prothèses.
Un équilibre est espéré.
Autres notions

– Augmentation des prothèses non cimentées aux dépens des prothèses cimentées

– Diminution progressive du couple métal-polyéthylène aux dépens du couple céramique-polyéthylène. Le couple métal-métal progresse lentement.

– La chirurgie de révision croît progressivement de 0,5 % par an. Les taux actuels vont de 12 % en Allemagne à 17 % en Grande Bretagne, en France 16 %.

– La chirurgie de resurfaçage métal-métal a eu une croissance foudroyante en Europe, de 12000 en 2004 à 28000 deux ans plus tard. En France, cette technique demeure un peu marginale (1500 prothèses par an).